Ne pas confondre laïque et athé.
La France est un état laïque. Cela signifie, pour moi, que toutes les croyances religieuses peuvent s'y exprimer, s'y épanouïr, y compris l'athéisme.
Mais aucune Religion, aujourd'hui, ne considère l'assassinat des "incroyants", de leur confrérie, comme une punition justifiée.
Les meurtres perpétrés les 8 et 9 Janvier dernier, dans les locaux de CHARLIE Hebdo, dans la rue, et dans les magasins, sont ignobles.
Tuer des personnes non armées ce n'est pas une attitude de guerriers, qualification revendiquée par les assassins, mais de bourreaux.
Oui, je suis indignée et peinée.
Et comme je pense avoir le grand privilège de ne pas être athée, j'ai allumé une bougie en la mémoire des victimes, petite lumière qui représente mon accompagnement spirituel de leur âme en transit.
Et malgré tous mes ressentis je ne peux pas écrire ou dire "je suis CHARLIE".
J'aurais aimé pouvoir le faire et rejoindre ainsi la communauté de la plupart de mes amis qui estiment que cette affirmaton exprime leur Liberté d'expression !
Eh bien j'aurais aimé, mais si je le faisais
c'est ma propre Liberté d'expression que je ne respecterais pas.
Je pourrais aussi ne pas m'exprimer du tout, laissant présumer, par mon silence, que j'adhère à cette affirmation, mais si je le faisais
c'est ma propre liberté d'expression que je ne respecterais pas.
Je ne suis pas CHARLIE car je considère que notre Responsabilité et notre Liberté d'expression publique sont indissociables.
J'ai connu personnellement une personne qui se servait de l'humour pour égratigner les cicatrices de ses proches, et même les réouvrir :
- "Je t'ai mis en bout de table comme cela tu pourras disposer de 2 chaises pour poser tes fesses"
- "Ton regard est une véritable énigme, tu regardes à droite ou à gauche"
Si vous avez envie de sourire, c'est simplement parce que vous n'êtes pas concernés par tous les combats que vous auriez dû mener, et gagner, pour vous accepter, vous-même.
Une fois, une amie concernée par ce genre de plaisanterie a eu les larmes aux yeux. C'est mon regard vis à vis de "l'humoriste" qui a donné à celui-ci l'impression de devoir se justifier. Sa justification : " On rigole" !
Pour certaines personnes qui ont eu, pendant longtemps, l'impression d'être rejetées ou non reconnues, pour d'autres qui mènent une vie misérable et qui n'espèrent, de leur semblable, comme sentiment affectueux que de la pitié tant elles se sentent "diminuées", la dernière richesse qui leur reste et que nul ne pourra jamais leur enlever c'est leur foi.
Dans la religion Catholique, celle que je connais le mieux, le moment de la messe que je préfère est l'instant de la communion car :
- ce sont les plus "puissants" qui assument le service des autres
- et ceux qui communient s'avancent sans aucune priorité ou hiérarchie : jeunes, vieux, riches, pauvres, personnes alertes et personnes handicapées, blancs, jaunes, noirs... tous égaux, à cet instant.
Dans la religion Musulmane, dont je ne connais que le positionnement de prière, à genoux, je présume que chacun doit avoir aussi sa juste place.
Un lieu où le plus misérable obtient sa dose de reconnaissance qui, d'après Eric BERNE, fondateur de l'analyse transactionnelle (voir psycho), est un besoin psychologique tout autant vital que la nourriture, sur le plan physique
Alors, de la même manière que ma Liberté de comportement s'arrête au niveau où celle-ci porte atteinte à la Liberté de l'Autre : "A qui je ne peux emprunter sa voiture - ou même le hall de son habitation -sans son accord"
Ma Liberté d'expression doit être limitée par le niveau où elle est violente, moralement, pour l'autre. L'excuse "On rigole" je connais. Je ne l'accepte pas.
Ma Liberté d'expression Publique ne peut pas faire l'impasse des besoins vitaux d'individus ayant accès à ce que je diffuse, et, si elle le fait, par maladresse, l'Etat, représentatif de l'ensemble des citoyens, doit veiller à ce que ces maladresses soient réparées.
Cela permettrait aux personnes visées de se sentir considérées et éviterait de déléguer à n'importe quel déséquilibré de se charger de la "correction", à sa manière.
Cela éviterait, pire encore, de laisser une puissance d'assassins manipulateurs, utiliser des individus affaiblis par les souffrances chroniques "invisibles" qu'ils ont subies. Des non reconnus, des rejetés par une société de consommation où il ne leur a pas été donné de place, qui se sentent soudain en mission, transformés en archanges Michaël, Justiciers celestes... sur le chemin de leur retour au paradis.
Les caricatures, en première page affichées de CHARLIE, en tant que reproduction de celles, originales, d'un journal étranger, pouvaient avoir un rôle d'information de ce qui se produisait ailleurs.
Mais la couverture " Le CORAN c'est de la merde car ça ne protège pas des balles", même si le dessin caricature relativisait la validité de l'affirmation, je ne crois pas qu'aucun Musulman ait pu l'apprécier ou en rire sincèrement.
Tout comme "la Bible c'est de la merde" ou "l'Evangile c'est de la merde" "parce que ça ne protège pas des balles !!!"
Mais cela c'est moi qui vient de l'inventer pour communiquer un ressenti désagréable, à l'appui de ma démonstration, à ceux qui ne sont pas athés.
Rien à voir avec leur couverture de "l'accouchement de la vierge" car si Dieu s'est fait homme en Jésus, il fallut bien qu'il naisse comme n'importe quel autre humain.
Pour moi, ce n'est pas la Liberté de l'information qui était visée mais le sentiment d'avoir perdu son droit à reconnaissance par le "salissement" de celui à qui ces êtres devaient leur vie et leur eternelle reconnaissance.
On avait insulté "leur père qui est aux cieux".
Si ça avait été les auteurs de Médiapart qui aient été exécutés, dans ce cas, on aurait pu conclure, sans ambiguité, que c'était bien la Liberté de l'information qui ait été visée.
Pas les chroniqueurs de CHARLIE. Ils n'informaient pas, ils amusaient.
Parfois avec maladresse, parfois avec talent :
Je me souviens d'une couverture de leur journal que j'avais particulièrement appréciée :
Deux hommes allongés dont on ne voyait que les jambes et les pieds, au sol, pieds à pieds, et la légende : "les morts ont perdu la guerre"
C'est cette devise que je veux retenir en leur mémoire.
Et puisque j'y suis : J'y reste :
Si vraiment il y a un danger terroriste imminent, comment peut-on organiser des réunions de masse, dans la rue, avec des papi-mami et des enfants ?
Est-ce de l'inconscience, de l'incompétence ou de la manipulation publique (et dans ce cas, je l'avoue, je ne vois pas encore clairement l'objectif poursuivi), alors qu'il suffit d'un cri de déséquilibré dans la foule pour créer une panique meurtrière comme on l'a vu recemment en Asie (là c'était un lâcher de faux billets de banque par un hélicoptère ou un avion survolant la foule).
Sans compter que pour des déséquilibrés armés c'est comme des chasseurs qui, au cours de leur marche, se trouveraient soudain devant une réserve.
Serait-il venu à l'idée aux résistants de défiler, en temps de guerre, devant l'armée ennemie ?
Et si un qui sait, peut faire nettement plus que 100 qui cherchent, un qui est armé d'une mitraillette, peut faire nettement plus de dégâts que 1000 qui se trouvent devant, à mains nues. Tous les rescapés de camps en témoignent.
Voilà!
J'espère que mes amis, même les plus fanatiques de la Liberté d'expression, me garderont leur amitié à laquelle je tiens, en respectant la mienne... de liberté d'expression.
Et comme moi, j'accepte leurs affirmations, ils accepteront la mienne.
Je ne suis pas CHARLIE et je suis désolée par l'exécution de tous ceux qui subissent la violence meurtrière de personnes qui se croient le droit, quand ce n'est le devoir, de tuer ... y compris eux-mêmes !
Françoise A-M